Le café rodriguais semble être promis à un bel avenir, étant considéré comme un produit haut de gamme par les experts. Il y a certes eu des hauts et des bas, mais aujourd’hui la production professionnelle de café est bien une réalité. Les différents échantillons envoyés dans des laboratoires européens pour analyse ont été très concluants. Et dans ce contexte, une dégustation de ce précieux breuvage a eu lieu lors d’un ‘Salon du café’ tenu le 13 mars dernier à la maison du café à St Gabriel. Cela, en présence du Vice Président de la République Eddy Boissezon, ainsi que d’autres dignitaires de l’Assemblée régionale. Une étude analytique est en cours pour identifier l’origine du café rodriguais, afin qu’il puisse être authentifié pour être apprécié à sa juste valeur à travers un ‘Brand Name’ qui n’a pas encore été défini. Construite depuis plusieurs années au coût de plus de Rs 20 millions, l’unité de transformation de café vient tout juste de commencer à opérer en ce mois de mars sous l’égide de la ‘Rodrigues Coffee Company’, la compagnie fraîchement incorporée qui gère la maison du café.

Quand on parle de café en général, on parle de saveur. Surtout pour les fins connaisseurs. Beaucoup de pays produisent du café pour la quantité mais pas forcement pour la qualité. Rodrigues s’est donc donnée pour objectif de produire un café de qualité supérieure. Les fins connaisseurs achèteront donc ce produit à un prix très élevé, selon les spécialistes, et c’est ce que vise la ‘Rodrigues Coffee Company’, la compagnie fraîchement incorporée et qui gère la maison du café. Cette même compagnie achète tout le café produit par la société coopérative mais également des particuliers qui souhaitent écouler leurs récoltes. Celle-ci se charge ensuite du ‘processing’ et de la distribution sur les marchés locaux, régionaux et éventuellement internationaux du café qui aura un label ‘Made in Rodrigues’. La société coopérative de café, la ‘Rodrigues Coffee Producers Cooperative Society Co Ltd’, composée de 13 planteurs qui possède chacun un lot d’environ un arpent, a commencé la culture de café à St Gabriel en 2013 sur une superficie de plus de 13 arpents. Plus de 11 000 plants de café sont cultivés à ce jour. Et après la mise en terre, un caféier prend trois ans avant de produire des cerises pour deux récoltes par an. Les planteurs seront liés à la ‘Rodrigues Coffee Company’ par un contrat afin d’éviter que ce produit soit bradé par les acheteurs intermédiaires pour ensuite être revendu à prix d’or, comme c’est le cas actuellement pour le miel et l’ourite. Une très bonne initiative qui assurera aux planteurs un prix garanti pour leurs produits. Du coup, encourageant d’autres planteurs à intégrer cette filière.

Il faut beaucoup d’efforts, de patience et d’expérience pour pouvoir produire un café de qualité. Et Rodrigues se targue de d’offrir un produit qui comporte une certaine dose d’acidité, ce qui est très rare. Deux cyclones consécutifs au cours du mois de mars en 2019 avaient mis les planteurs complètement à genoux. Et étant regroupés au sein d’une société coopérative, ils n’avaient pas pu être indemnisés, car l’indemnisation ne touche que les individuels. Ce qui explique que plusieurs planteurs aient baissé les bras. Car en 10 ans, les planteurs n’ont toujours pas obtenu de retour sur leur investissement. La première récolte pour l’année en cours n’est pas jugée très satisfaisante non plus à cause d’un manque de pluie. 500 kilos de cerises sont attendus cette année. Mais l’objectif final est d’en produire cinq tonnes annuellement dans le long terme. Et au 13 mars, 100 kilos avaient déjà été récoltés à St Gabriel par la société coopérative. Les autorités visent un marché au niveau de l’Europe. Car selon les experts, le café ‘Arabica’ rodriguais possède un goût et une propriété exceptionnels qui lui confèrent un gros potentiel. De ce fait, il est primordial que Rodrigues mette toutes les chances de son coté en exploitant toutes les possibilités ainsi que les zones de coopérations disponibles. Si au début du mois le prix d’achat par la ‘Rodrigues Coffee Company’ était de Rs 40 le kilo de cerises, il a doublé en quelques semaines pour passer à Rs 80 le kilo. Toutefois, les prix varieront selon les différents grades de cerises. Car deux lots adjacents de culture ne produiront pas forcement la même qualité de cerises.

Pour être prêtes à être récoltées, les cerises doivent être de couleur rouge bordeaux. Après la récolte, les cerises sont mises à sécher, pour être décortiquées après un mois selon la méthode professionnelle, ce qui mènera vers la transformation. Tandis que le processus traditionnel diffère quelque peu. Selon cette méthode, après la cueillette, les cerises sont mis à tremper dans l’eau pendant quelques heures. Suite à quoi elles sont décortiquées (les peaux sont enlevées) manuellement, avant d’être mis à sécher. Et en temps de gros soleil, une journée suffit pour le séchage. Elles sont ensuite grillées dans un ustensile sur feu de bois, avant d’être broyée dans un mixer pour produire le café moulu.

Selon le consultant réunionnais Patrice Deberge, qui est également producteur et négociant en café et exportateur de ce produit à l’île de La Réunion, d’ici cinq ans, le café rodriguais, qui a un goût chocolaté, fera un tabac en Europe et sera un des produits phares de Rodrigues. « Il sera comme un grand cru, avec un goût et une qualité exceptionnels. Ce café, d’une qualité très rare, qui est endémique à Rodrigues et qu’on ne trouve nul part ailleurs, peut être associé à d’autres produits naturels tels que la vanille pour produire un café vanillé. Il faut foncer », dit-il. Il semblerait que le goût exceptionnel de ce café est déterminé, entre autres, par le micro-climat de l’île. Les autorités locales ont exprimé leur volonté d’encadrer et de soutenir à fond les planteurs de café afin d’augmenter la production pour atteindre quelques deux tonnes de cerises par an dans le moyen terme. Cependant si tout se passe comme prévu, ce chiffre est appelé à augmenter dans les années à venir. Dans un proche avenir, la dégustation de café se veut être un évènement touristique, ou les visiteurs auront l’opportunité de visiter les plantations de café, ainsi que les différents processus de fabrication de ce produit, car Rodrigues s’est donné pour objectif de devenir la vitrine de l’océan indien, avec le café de Rodrigues dans les boutiques hors taxe des aéroports.

Du coup, il faut que plus de terrain soit mis à la disposition des planteurs dans des endroits appropriés et adaptés à cette culture, afin d’encourager d’autres personnes à s’engager et à investir dans cette filière très porteuse et prometteuse. Une filière qui générera beaucoup de revenus si elle est monitorée comme il se doit. Certes, pour ce nouveau départ, des difficultés il y en aura. Mais avec de la persévérance, ainsi que l’effort de tout un chacun, la filière du café rodriguais est promis à un bel avenir. Nous verrons bientôt, pourquoi pas, le café rodriguais servi à bord des vols internationaux, avec un label rodriguais. Rodrigues est bien partie et les rodriguais sont connus pour être des gens courageux. Le café rodriguais coûtera très cher au niveau mondial, grâce à sa saveur, son goût et sa qualité exceptionnelle. Ce qui en fait un produit très haut de gamme qui sera très prisé. « Notre café vaudra de l’or et les négociants feront la queue pour venir acheter notre produit. C’est sur qu’il n’y en aura pas pour tout le monde et il sera vendu au plus offrant », soutient Louis Ange Perrine, le Commissaire à l’Agriculture.

Sur le marché mondial de la bourse, le café se place en deuxième position après le pétrole. C’est donc un secteur très porteur avec beaucoup d’argent à la clé et Rodrigues a la capacité requise pour produire ce café d’exception. A noter que le café rodriguais sera présenté dans un salon international en Italie en septembre prochain. « Alle café Rodrigues, Go Go Go ».